mardi 31 mars 2009

[Cinéma] La Première Etoile de Lucien Jean-Baptiste

'La Première Étoile' est l'histoire d'une famille de banlieue parisienne qui a du mal à joindre les deux bouts, où la mère fait tout et où le père ne fait rien à part jouer tout l'argent du ménage aux courses. Déconnecté des réalités, Jean-Gabriel promet à ses trois enfants et à sa femme de les emmener une semaine "au ski". Cette dernière, lasse de tant de promesses non tenues et d'un mari qui ne prend pas son rôle de père au sérieux, décide de ne pas prendre part à l'aventure et de laisser la place à sa belle-mère, au caractère bien trempée.

Annoncée comme la meilleure comédie depuis bien longtemps, 'La Première Étoile' n'est finalement qu'une comédie sympathique qui n'a rien d'exceptionnelle: les gags ont, pour la plupart, été vus et revus, les bons sentiments sont légions, les clichés aussi (la gamine noire qui remporte un concours de chant, les montagnards), les personnages sont assez caricaturaux (Bernadette Lafont en acariâtre et raciste logeuse) et la réalisation est sans intérêt. Surtout, 'La Première Etoile' suit un schéma de comédie classique (on part de tout va mal, on finit à tout va bien et tout le monde s'aime d'amour et de neige), que l'on aimerait bien voir disparaître tant il est éculé.

Cependant, tout n'est pas à jeter dans ce film. Car il faut avouer qu'il y a parfois de francs éclats de rire. Et si les timides sourires l'emportent plus souvent, on notera surtout la prestation de Firmine Richard, sur qui le film se repose entièrement, délicieuse Bonne-Maman, au caractère bien trempé et à l'énergie communicative.

Bref, sorte d'adaptation du 'Bienvenue Chez Les Chtits' façon créole, ce 'Bienvenue Chez Les Noirs, au Ski' est une comédie sympathique, sans prétention certes, mais qui finalement ne va pas au-delà.

'La Première Etoile'
Réalisé par Lucien Jean-Baptiste
Avec Lucien Jean-Baptiste, Anne Consigny, Firmine Richard, Bernadette Lafont, Michel Jonasz ...
1h30 -
2009


Bande-annonce de 'La Première Étoile':

samedi 21 mars 2009

[BD] Frederik Peeters - Ruminations

Quand Frederik Peeters mâche et remâche ses pensées et ses souvenirs, ils ressortent de sa panse avec un sacré goût de bile.

L'auteur des Pilules Bleues compile vingt-six nouvelles qui reflètent son cheminement depuis une dizaine d'années, petites histoires baignées de suc gastrique sorties du fond d'un estomac forcément brûlé, pour la plupart déjà parues (dans Bile Noire notamment). On reconnaît le trait impeccable de cet artiste devenu majeur qui est aussi à l'aise dans la moiteur réaliste de l'existence (Les Pilules Bleues) que dans la science- fiction humaniste (Lupus, oui, il paraît que je suis fan).

Peeters cultive l'éclectisme. Il navigue avec aisance d'un genre à l'autre, à la rencontre de sa conscience, d'un macabre artiste des cavernes, d'un tueur à gage philosophe, de ses compatriotes suisses, écorchés autant qu'aimés, ou encore... d'Orson Welles. Ses armes favorites : le cynisme, l'humour noir et un angle de vue finalement assez hédoniste par la saisie de ces petits instants de l'existence qui provoquent un bonheur simple. La candeur et l'innocence pour s'opposer à la réalité implacable de la vie.

A chaque retournement de son esprit, Peeters nous envoie une nouvelle partition, jouant avec les codes graphiques, changeant les points de vue, rendant ses personnages bavards ou à contrario complètement muets, se mettant en scène. Toujours avec talent, le suisse prend le lecteur dans son tourbillon, pour ne plus le lâcher qu'après un bon nettoyage de cerveau, retourné, amusé, effrayé, épuisé, apaisé.

Ce type est tout simplement l'un des auteurs de bandes dessinées les plus talentueux de ces dernières années.

Ruminations
Dessins / Textes: Frederik Peeters
Editeur: Atrabile - 21 €
Parution: 2008


Site officiel de Frederik Peeters

A voir également, son blog "thématique", un must de la toile.

vendredi 20 mars 2009

[Livres] Ken Follett - Un Monde Sans Fin

Deux siècles se sont écoulés depuis la fin des 'Piliers de la Terre'. Jack le Bâtisseur, Aliena et le prieur Philip ne sont plus de ce monde. Mais Kingsbridge est devenue une cité incontournable de l'Angleterre du XIVè siècle. Dans cette ville prospère qui compte désormais des milliers d'âmes, quatre jeunes enfants se rencontrent: il y a là Merthin et son petit frère Ralph, Gwenda fils d'un paysan sans terre et voleur à la petite semaine et Caris, la fille du prévôt de la guilde de la ville. En partant se balader, ils assistent impuissant à la lutte entre deux gardes armés et un chevalier blessé. Ce dernier l'emporte devant des enfants terrifiés, avant de cacher sous un arbre une missive secrète qui ne doit pas tomber dans les mains de n'importe qui et de confier le secret au seul Merthin. Mais combien de temps ce secret restera t-il enfouit dans la terre sèche anglaise?

Vingt ans après ses 'Piliers de la Terre', Ken Follett revient donc aux affaires avec cette nouvelle histoire. Là aussi, tout ne va être que rebondissement, amour impossible et tragédies tout au long de 1200 pages très fournies. Ken Follett repart sur les mêmes bases en changeant le caractère des protagonistes: le comté de Shiring n'a cette fois rien de sympathique et le prieuré de Kingsbridge est pris en main par de fieffés coquins avides d'argent et de pouvoir.
Toutefois, en choisissant d'externaliser son histoire le temps de quelques chapitres (la guerre en France, Merthin à Florence), Ken Follett réussit à se réinventer. Surtout, en intégrant la peste à son roman, il lui donne une dimension encore plus dramatique que dans le premier tome.

C'est également pour lui, et bien plus que dans 'Les Piliers de la Terre', l'occasion de lancer des piques à cette institution ecclésiastique perdue et dont l'influence semble décroitre à mesure des mauvais choix et des décisions catastrophiques qu'elle prend.

Toujours dans ce style agréable à lire, sûr de son écriture et de son talent de narrateur, Ken Follett réussit une fois de plus à plaire et à passionner. On pourra cependant lui reprocher d'avoir pris les mêmes trames générales, en changeant les qualités des protagonistes. On ergotera qu'il tombe dans la facilité avec de - très - nombreuses scènes de sexe et de viols au caractère parfois douteux. On discutera même les cent dernières pages du livre qui tentent de répondre à un maximum de rebondissements mais qui finissent par dérouter le lecteur.

Toutefois, ne nous leurrons pas: 'Un Monde Sans Fin', s'il n'a pas la grâce et le talent de son prédécesseur, reste un bon roman et un thriller moyenâgeux très agréable à dévorer. Rien de moins. Rien de plus.

Titre original: World Without End
Origine: Royaume Uni
Année: 2008

samedi 14 mars 2009

[Livres] Ken Follett - Les Piliers de la Terre

Tout se déroule au XIIè siècle. Tom le Bâtisseur a un rêve: construire une cathédrale, la plus haute, la plus belle. Malheureusement, il vient de tomber au chômage: le seigneur pour lequel il travaille vient en effet de lui annoncer avec dédain qu'il arrêtait les frais de la construction de sa nouvelle demeure. Raison invoquée? Il devait épouser la comtesse de Shiring, Aliena, mais celle-ci, forte tête, a refusé.
Tom se retrouve donc sur les routes avec sa femme, enceinte, et ses deux enfants, en train d'essayer de survivre dans une Angleterre frappée par un hiver glacial. Rapidement, et après quelques déchirures et autres rencontres, toute la troupe arrive à Kingsbridge où le bon prieur Philip, récemment nommé, et grâce à l'aide de Jack, le fils de sa deuxième compagne, l'embauche pour construire la cathédrale la plus belle d'Angleterre. Une construction qui sera un chemin de croix...

A la base, le pari semblait risqué: écrire un roman sur le moyen-âge relevait de la gageure tant le résultat pouvait être ennuyeux. Mais Ken Follett réussi haut la main son entreprise. Car 'Les Piliers de la Terre' est un roman palpitant. Un livre qui s'étale sur deux tomes de 600 pages, où tout n'est que magouilles, manipulations, trahisons, meurtres, viols, peines, joies, tristesse, amour, romance, désordre politique et combats pour la coiffe royale. Le tout chapeauté par une église omnipotente et omniprésente, qui est le principal pouvoir d'une Angleterre qui tente de survivre.

Sa - légère - faiblesse est finalement ce qui fait le centre de son œuvre: les cathédrales. En s'apesantissant un peu trop sur de longues et répétitives descriptions de constructions, Ken Follet perd parfois son lecteur. Mais à part ces quelques passages, 'Les Piliers de la Terre' s'avère être un véritable thriller médiéval de haute volée, où les coups bas répondent aux traitrises passées, dans une enchaînement de rebondissements inattendus mais bienvenus.

Passionnant de bout en bout, écrit dans une style fluide et agréable, 'Les Piliers de La Terre' est une véritable saga qui sort de l'ordinaire et une œuvre majeure du genre. A lire absolument.

Nb: 'Un Monde Sans Fin', la suite de 'Les Piliers de la Terre' est sorti l'an passé. Chronique ici.

Titre original: The Pillars of the Earth
Origine: Royaume-Uni
Année: 1989

jeudi 12 mars 2009

[Livres] Todd Strasser - La Vague

A la fin des années 60, aux États-Unis, une expérience avait été menée par un professeur d'histoire, Ron Jones, dans un lycée de Californie. Ayant en charge des terminales et alors qu'ils étudient la seconde guerre mondiale et les atrocités commises par les nazis, il se rend compte que sa classe ne comprend pas comment les allemands ont pu en arriver là et suivre un chef comme Hitler sans se poser de questions.
Ces interrogations vont déboucher sur une expérience inédite, La Vague, menée par Ron Jones afin de faire comprendre à ses élèves ce qu'était de vivre en Allemagne dans les années 30 sous le nazisme. Ordre et discipline en sont les maîtres mots, les slogans «La force par la discipline, la force par la communauté» les moteurs, le geste mimant une vague le point de ralliement. Rapidement, les élèves adhèrent à l'idée. Malheureusement, un peu trop ...

Le pitch est très intéressant et promettait beaucoup. Et au final, j'ai été assez déçu. Le livre n'est pas spécialement bien écrit, très narratif, sans aucune prise de risque stylistique. 'La Vague' est un livre très court qui se lit en une bonne 1h30. Et c'est un vrai obstacle car rien n'est fouillé, tout ne reste qu'en surface. Aucune réflexion n'est proposée au final. Jamais de remise en cause. C'est à peine si l'on voit l'évolution des protagonistes, qui reste d'ailleurs extrêmement caricaturale. Tout va très vite, trop vite. Au final, tout est un peu gentillet, tout n'est finalement pas si grave. On a même souvent l'impression de lire un manuel d'histoire qui débiterait de façon assez monotone l'histoire contemporaine.

Alors oui, on me rétorquera, à juste titre, que l'histoire s'est sûrement et effectivement déroulée de cette façon et que Todd Strasser a voulu la respecter au plus près. On ajoutera également que 'La Vague' n'est qu'une adaptation romancée d'un téléfilm consacré à l'expérience. Certes.

Il n'empêche, je continue de penser qu'il y avait matière à pousser une réflexion plus loin, à faire s'interroger les personnages sur leurs attitudes, à développer de plus grandes théories. 'La Vague' est donc une grande déception où plane un fort sentiment de gâchis.

Titre original: The Wave
Origine: États-Unis
Année: 1981